OpinionPolitique

L’Appel du Roi à l’Aïd: Quand le Sacrifice Devient un Casse-Tête Économico-Écologique

Par REGHAI Yassmina

C’est officiel : même la tradition la plus sacrée n’échappe pas aux réalités du 21ème siècle. Cette année, le roi du Maroc a gentiment ordonné que les fidèles puissent reconsidérer le sacrifice rituel de l’Aïd al-Adha. Motif invoqué ? Une sécheresse à faire pleurer les cactus et une économie qui tangue plus qu’un dromadaire en crise de panique.

Un Sacrifice… Mais Pour Qui ?
D’un côté, les défenseurs de la mesure applaudissent : « Enfin, une vision responsable ! » Après tout, pourquoi égorger un mouton alors que le pays manque d’eau et que le prix de la bête a atteint des sommets dignes d’un cours de Bitcoin ? Entre l’inflation et les restrictions d’eau, sacrifier un animal relève presque du luxe. D’ailleurs, certains économistes suggèrent que si on additionnait le coût de tous les moutons sacrifiés, on pourrait peut-être… acheter un barrage.

Mais de l’autre côté, les traditionalistes s’étouffent dans leur thé à la menthe : « Quoi ? Pas de mouton ? Mais comment vais-je expliquer à Allah que j’ai opté pour un don en crypto-monnaies à la place ? « La mesure, aussi pragmatique soit-elle, vient chatouiller un nerf sensible : celui de la liberté religieuse. Car l’Aïd al-Adha n’est pas qu’un barbecue géant – c’est un acte de foi, un symbole, une tradition millénaire. Et quand le politique s’invite dans le religieux, ça donne toujours des étincelles.

Yasmina REGHAI
Yasmina REGHAI
Entre Écologie et Théologie: Le Grand Écart: Sa majesté le roi, en bon équilibriste, envisage une nouvelle façon de concilier modernité et tradition, sans froisser ni les écologistes ni les imams. Mais soyons honnêtes: demander à un croyant de renoncer à son mouton, c’est un peu comme demander à un Français de renoncer à sa baguette. “On peut… mais est-ce qu’on veut? »

Certains y voient même une forme de « greenwashing spirituel »: « Tiens, cette année, au lieu d’un mouton, plante un arbre! ». Sympathique, mais difficile de rivaliser avec 4000 ans de tradition abrahamique. D’autant que dans les faits, beaucoup préfèreront sans doute braver la sécheresse et les prix plutôt que de risquer le courroux divin – ou pire, les regards réprobateurs des voisins.

Et Pendant Ce Temps, les Moutons Soufflent… de Soulagement. Ironie suprême : les principaux concernés par cet appel, les moutons, n’ont probablement pas été consultés. Eux qui se préparaient mentalement à leur grand jour doivent se dire : « Enfin, une bonne nouvelle ! »Hélas, ne crions pas victoire trop vite. Car entre les recommandations royales et la réalité du terrain, il y a un fossé… que beaucoup franchiront allègrement, mouton sous le bras.

Ah, l’exception marocaine !Cette interdiction si exceptionnelle qu’elle soulève des questions si évidentes qu’on se demande pourquoi personne n’y a pensé avant. En l’absence d’un texte de loi clair – parce que rien ne vaut un bon flou juridique pour pimenter la fête –, les citoyens sont laissés dans une délicieuse incertitude. Que risquent-ils à égorger un mouton en cachette ? Une amende entre 1.000 et 5.000 dirhams, murmure-t-on dans les ruelles. Mais rassurez-vous, aucune autorité n’a daigné confirmer ou démentir : après tout, pourquoi clarifier les choses quand on peut entretenir un petit suspense anxiogène? Résultat: la confusion règne, l’opinion s’échauffe, et le mouton, lui, se demande s’il va finir en tajine ou en symbole politique.

En conclusion, cet épisode révèle une tension bien moderne: comment concilier foi et pragmatisme, tradition et urgence climatique ? Pour l’instant, la réponse semble être: « Faites ce que vous voulez, mais ne dites pas qu’on ne vous a pas prévenus ».

Et si jamais, cette année, vous croisez un mouton vivant le jour de l’Aïd… dites-lui qu’il a de la chance.

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page