
Par Yasmina Reghai
Chers lecteurs, il fut un temps où l’élu marocain était perçu comme un modèle d’éloquence, maniant la langue de Molière (ou de Abdelkrim Ghallab) avec une finesse digne des grands diplomates. Aujourd’hui, force est de constater que certains discours politiques ressemblent davantage à des scènes de télé-réalité qu’à des joutes parlementaires. Entre invectives, menaces à peine voilées et métaphores douteuses, le niveau a atteint des sommets… ou plutôt des profondeurs.
2025. Ou l’année où la politique marocaine s’est prise pour une téléréalité: Sur les bancs des institutions, on ne débat plus, on s’écharpe. Les mots volent bas, les invectives haut. Il ne s’agit plus de convaincre, mais de faire le buzz. À ce jeu-là, certains élus semblent avoir troqué leur mandat contre un micro, un ring, voire une caméra bien placée.
Un spectacle qui rivalise avec les dramas ramadanesques. Les séances de questions orales ou les débats locaux sont devenus un terrain de jeu où la logique et le respect prennent des vacances permanentes. On se croirait parfois dans une arène, où l’objectif n’est plus de convaincre, mais d’écraser l’adversaire sous une pluie de sous-entendus mal placés.
Du Parlement aux réseaux, la scène est prête: On croyait avoir tout vu en 2023. C’était mal connaître l’imagination débordante de nos élus, version 2025. Punchlines agressives, menaces à peine déguisées, egos surdimensionnés et applaudissements nourris… par les likes. Le citoyen, lui, observe – tantôt amusé, souvent consterné – ce théâtre où la politique devient un spectacle permanent, sans entracte ni ligne éditoriale.
Et le cadre légal, dans tout ça ?
Liberté d’expression, oui. Libération totale de la parole au mépris de la loi, non. Quand l’injure remplace l’argument, quand l’accusation prend le pas sur le fait, quand le procès devient une étape médiatique… c’est la démocratie qui tousse. Et la justice, elle, commence à perdre patience.
Revenir à l’essentiel, avant la sortie de route: Pendant que certains peaufinent leur prochaine punchline, le Maroc attend toujours des réponses concrètes à ses vraies urgences : éducation, climat, emploi, justice sociale. Mais dans la cacophonie ambiante, qui les entend encore ?
Alors, si 2025 restera dans l’Histoire, espérons que ce ne soit pas uniquement comme l’année où les élus ont brillé… par leurs débordements. Et rêvons, oui rêvons encore, d’une année 2026 où la parole politique serait, enfin, à la hauteur du peuple qu’elle prétend représenter.