
MANAL RMILI
Depuis plusieurs jours, le Maroc est traversé par les manifestations de la Génération Z. Les slogans, les attroupements et les confrontations occupent l’espace public et les réseaux sociaux. Mais derrière ces images spectaculaires, c’est l’ensemble de la société qui est touché. Car les manifestations ne concernent pas seulement ceux qui y participent. Elles résonnent jusque dans les foyers, les lieux de travail, les marchés et les cafés. Elles deviennent une toile de fond qui accompagne la vie quotidienne de millions de Marocains.
Aujourd’hui, beaucoup de citoyens avancent dans une atmosphère marquée par l’incertitude. Ils continuent à travailler, à étudier, à s’occuper de leurs familles, mais toujours avec cette question en arrière-plan, que va-t-il se passer ? L’issue des événements n’est pas claire, et ce flou alimente une tension intérieure. Même ceux qui ne manifestent pas ressentent le poids de cette attente. Ils écoutent, ils observent, ils suivent les nouvelles. Ils s’interrogent, parfois en silence, sur l’avenir immédiat du pays et sur l’impact que ces mouvements pourraient avoir sur leur propre vie.
Cette incertitude se traduit par une vigilance accrue. Dans les conversations, dans les échanges informels, on retrouve une prudence, une retenue. Chacun cherche à comprendre sans forcément oser se prononcer. Les regards se tournent vers la rue, mais aussi vers l’horizon plus large, comment ces manifestations vont-elles évoluer, seront-elles écoutées, ou bien se perdront-elles dans un nouveau cycle de frustration? Ce sont ces questions, souvent sans réponse, qui façonnent le mental collectif de ce moment. En même temps, il y a une volonté persistante de continuer à vivre. Le pays ne s’est pas arrêté : les bus circulent, les écoles accueillent les élèves, les bureaux fonctionnent, les marchés restent animés. Cette continuité exprime une résilience discrète, une manière de dire que la vie ne peut pas se suspendre indéfiniment. Les Marocains, habitués à composer avec l’incertain, avancent malgré tout, sans renier leurs inquiétudes, mais en refusant de céder à la paralysie.
Ainsi, l’état mental actuel de la population marocaine se situe dans un entre-deux. Il n’est ni indifférent ni totalement accaparé par les manifestations. Il est traversé par une attente, par une crainte diffuse, mais aussi par une volonté de rester debout et de maintenir les gestes ordinaires de la vie. C’est une société qui observe, qui se questionne, qui ressent le poids de l’incertitude, mais qui continue d’avancer dans un équilibre fragile entre inquiétude et résilience.