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Mariage, divorce et café crème : la loi qui voulait mettre de l’ordre dans le désordre amoureux

par REGHAI YASMINA

Au Maroc, l’amour hors mariage est un sujet aussi délicat qu’un plateau de thé posé au bord d’une table.
Alors quand un projet de loi a proposé de réglementer les relations non maritales, les réactions ont oscillé entre « Enfin une modernité ! »et «Mais quelle horreur, la pudeur! ».
Entre conservatisme religieux, réalités sociales et un zeste de bureaucratie, retour sur une polémique qui a fait tousser plus d’un·e Marocain·e… sans oublier l’inévitable article 490, ce fantôme juridique qui hante toujours les discussions.

1. Le projet de loi: quand l’État s’invite dans votre chambre:
L’idée ? Encadrer les unions libres pour, officiellement, « protéger les droits des femmes et des enfants ». Concrètement, le texte envisageait d’obliger les couples non mariés à déclarer leur relation auprès des autorités. Histoire que, si bébé arrive ou que la rupture survient, personne ne se retrouve sans filet juridique.

Yasmina REGHAI
Yasmina REGHAI
Les pour:
– « Enfin une reconnaissance pour les couples qui ne veulent pas se marier! »
– « Cela pourrait éviter des drames, surtout pour les femmes et enfants sans protection. »

Les contre:
– « Le Maroc n’est pas prêt pour ça, c’est contraire à nos valeurs! »
– « Et si on arrêtait de fouiller dans la vie privée des gens? »

2. L’article 490 : l’éléphant (très encombrant) dans la pièce:
Impossible de parler de relations hors mariage sans évoquer l’article 490 du Code pénal, qui criminalise les relations sexuelles entre adultes non mariés.
Une disposition héritée d’une autre époque, mais qui continue de faire des ravages:

– Double peine pour les femmes : souvent, ce sont elles qui écopent de poursuites, surtout en cas de grossesse ou de dénonciation.
– Instrument de chantage : utilisé pour régler des conflits familiaux ou faire pression sur des couples.
– Débat récurrent sur son abrogation : des associations féministes et des défenseurs des droits humains militent depuis des années pour sa suppression, tandis que les conservateurs brandissent l’argument de « la protection des valeurs islamiques ».

En 2023, la polémique a refait surface quand une proposition d’abrogation a été évoquée (puis rapidement enterrée). Résultat : le débat reste bloqué entre modernité et tradition, et l’article 490 continue de criminaliser des relations pourtant consenties.

3. La polémique : entre tabou et hypocrisie:
Le projet de réglementation des unions libres a ravivé une question plus large : peut-on légiférer sur la vie privée sans tomber dans l’arbitraire?

– Les conservateurs ont crié à « l’incitation à la débauche », comme si légaliser un constat équivalait à encourager la chose.
– Les progressistes ont rétorqué : « Si l’État ignore ces relations, il laisse des milliers de femmes et d’enfants sans droits… tout en maintenant une loi archaïque qui les punit ! »
– Les réalistes ont soupiré : « De toute façon, ceux qui veulent vivre ensemble le feront, avec ou sans papier… mais toujours sous la menace du 490. »

4. Le cafouillage juridique : protéger ou contrôler ?
Le vrai problème ? La proposition était aussi floue qu’un SMS envoyé après minuit.
Comment prouver une relation ? Faudra-t-il un contrat ? Un témoin ? Un selfie daté devant la mairie?

Et surtout: cette loi ne risquait-elle pas de renforcer la surveillance des couples, alors même que l’article 490 plane comme une épée de Damoclès?

Conclusion: L’amour, oui… mais pas trop quand même
Finalement, le projet a été révoqué, comme souvent quand on touche aux sujets qui fâchent.
Mais il a au moins eu le mérite de relancer le débat sur l’article 490 et son absurdité: comment protéger les femmes tout en les criminalisant?

En attendant, les couples non mariés continueront leur vie… discrètement. Parce qu’au Maroc, entre ce qui se dit et ce qui se fait, il y a parfois tout un océan de non-dits… et un Code pénal qui refuse de voir la réalité en face.

Morale de l’histoire: Si l’amour est aveugle, la loi, elle, a la vue parfaite… mais choisit souvent de fermer les yeux. (Et de garder l’article 490 bien au chaud, au cas où).

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