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Le crépuscule des illusions blanches – Agadir, l’hôpital au bord de la rupture

Par Reghai Yasmina

Un drame qui n’aurait pas dû arriver: Août 2025 a laissé un goût amer à Agadir. En quelques jours, plusieurs femmes ont perdu la vie après leur accouchement à l’hôpital Hassan II. Des décès que beaucoup estiment évitables et qui ont déclenché une onde de choc dans toute la région. À travers ces drames, c’est surtout la fragilité d’un système de santé en surchauffe qui éclate au grand jour : manque chronique de moyens, gestion flottante et infrastructures dépassées.

Un ras-le-bol populaire amplifié:
Les réseaux sociaux se sont transformés en caisse de résonance d’une colère longtemps contenue. Images de patients sur des brancards improvisés, familles dénonçant des pénuries basiques, rumeurs de corruption : autant de signaux qui ont attisé la défiance. Le 14 septembre, la rue a parlé haut et fort, rassemblant plusieurs milliers de citoyens. Leur message ? L’accès aux soins doit primer sur les grands projets de prestige.

Un hôpital qui craque de toutes parts: L’enquête lancée par les autorités a confirmé ce que les habitants vivaient déjà : absences récurrentes du personnel, pannes d’équipements vitaux, salles d’opération mal approvisionnées et bâtiments vieillissants. Construit en 1967, le CHR Hassan II peine à absorber l’afflux démographique et la mission universitaire qu’il assure depuis 2017. Résultat : une pression insoutenable sur une structure qui n’en peut plus.

La réaction officielle : entre symboles et promesses: Sous la pression, des têtes sont tombées : direction de l’hôpital, direction régionale et délégation provinciale ont été écartées. Une enveloppe de plusieurs millions de dirhams a été annoncée, ainsi que de nouveaux équipements. Mais ces mesures ressemblent davantage à un pansement sur une plaie profonde qu’à une vraie réforme. Pendant ce temps, le futur CHU d’Agadir, promis depuis des années, attend toujours son ouverture malgré son état quasi achevé.

Yasmina Reghai
Yasmina Reghai
Au-delà d’Agadir, un malaise national: Ce qui se joue ici dépasse la seule ville d’Agadir. Le Maroc affiche un ratio de lits très en dessous des standards, et les dépenses de santé restent grevées par des choix budgétaires qui interrogent. Quand des milliards sont injectés dans des stades, les hôpitaux, eux, attendent encore d’être rénovés.

Et maintenant ? La colère d’Agadir devrait être l’étincelle d’un réveil collectif. Cela passe par l’ouverture immédiate du CHU, une gouvernance hospitalière plus transparente et un budget de la santé qui reflète enfin son importance vitale. Le pays ne peut plus se contenter de demi-mesures. Parce qu’au bout du compte, la santé publique n’est pas une faveur, c’est un droit.

En attendant le CHU flambant neuf, on bricole avec les vieilles briques.

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